Nous sommes à 50 jours d’un vote fatidique pour notre pays, d’un vote fondamental pour l’Europe.

A l’aube de ce rendez-vous, notre bulletin de vote ne doit pas trembler. Il s’agit de l’ultime possibilité de rendre possible le rebond d’un pays, d’une Europe maltraitée.

Maltraitée par une pensée unique, libérale, qui a préféré sacrifier ses citoyens, sa chair, sur l’autel de quelques uns dont le seul objet est de considérer les peuples non plus comme des forces laborieuses (ce n’est plus son propos depuis le siècle dernier), mais comme des masses à endetter. Avec pour victimes collatérales: le lien social, le pacte social, le progrès social.

Ce corps social, est alors une proie facile pour toutes les peurs, les rancoeurs, les oppositions des uns contre les autres, terreau de toutes les idées puantes qui font le lit de l’extrême-droite européenne. Quand l’histoire tousse.

Dans ce contexte, la social-démocratie européenne a sa responsabilité. Parce qu’elle a abandonné son rôle d’Éducation Populaire, elle a renoncé à penser la progrès social. Sa pensée a progressivement glissé du paradigme « Créer des richesses pour pouvoir les distribuer » vers « Créer des richesses pour créer des richesses ». Elle a voulu, très « scolairement », démontrer qu’elle était capable de bien « gérer », (hélas au sens social-libéral du mot), en cherchant les bons points venant du dogme des bien-pensants. Ainsi la social-démocratie est devenue amnésique de sa raison d’être.

Le plus souvent mue par la peur de paraître rétrograde, passéiste voire « archaïque », elle a oublié que:

  • la croissance économique n’est pas forcément synonyme de progrès social.
  • l’espace économique partagé n’a de sens que s’il résulte d’un projet politique partagé (ou qu’il en ait la finalité)
  • la concurrence libre et non faussée n’a pas de sens.

L’égalité réelle de l’accès à l’emploi, à la santé, à l’éducation, aux services publics en a un.
Le progrès social réel et non faussé constitue une des conditions du ciment entre les peuples.

Dans ce contexte, cette élection présidentielle nous donne l’occasion de re-composer la gauche.

Je suis adhérent du Parti Socialiste. C’est-à-dire que j’adhère à ce qui le fonde. Je n’adhère pas toujours à ses positions. Ce fut le cas en 2005, où je me suis, avec bien d’autres, fortement engagé et battu pour le NON au traité constitutionnel européen, pour construire une autre Europe.
J’ai fait le pari à cette époque que pour que la gauche triomphe, il fallait que le PS accepte de s’ancrer à gauche. Pas par opportunisme, mais par sens.

Pour cela deux leviers:

  • faire vivre l’aile gauche du PS au sein du PS
  • soutenir le dialogue, vaille que vaille, avec les acteurs de la transformation de la gauche: aujourd’hui, le Parti de Gauche.

Aujourd’hui un premier bilan:
L’intervention simultanée et (hélas) non-concertée et non-conjointe entre l’aile gauche du PS et le Parti de Gauche, a permis d’ancrer la candidature de François Hollande à gauche.

C’est pour cela que sans aucun état d’âme, le bulletin de François Hollande sera dans mon enveloppe.

Je voue une reconnaissance totale à JL Mélenchon pour au moins 8 points:

  • il est le premier représentant socialiste (qu’il reste) à avoir les tripes de réaffirmer les enjeux fondamentaux quitte à se faire traiter de crypto-marxiste.
  • il est le premier représentant de gauche à avoir les tripes d’affronter réellement le Front National. Frontalement. Jusqu’à accepter de reprendre le mot « front » réaffirmant ainsi qu’il s’agit bien d’un combat.
  • il a mouillé la chemise pour que le regard du PS se dirige à nouveau vers sa gauche plutôt que vers Bayrou, dégonflant ainsi automatiquement ce mirage (le travail des Primaires Citoyennes n’y est pas pour rien non plus…)
  • il est le premier à avoir posé un corpus de pensée et à s’être engagé dans une démarche d’éducation populaire dans le droit fil de ce qui avait été lancé à l’occasion du TCE et qui devrait être l’essence de tout parti politique.
  • il est enfin celui qui par son charisme, parvient à faire revenir aux urnes celles et ceux qui s’en étaient éloignées.
  • enfin, et surtout, il parle aux ouvriers, aux couches populaires et il a recentré son logiciel politique autour d’une idée forte « servir le peuple ». Cela devrait être le cas de tous les élus. Il se différencie en cela de tous ceux qui se sont, au fil du temps, « servi du peuple ».
  • par la planification écologique avoir intégré les questions écologiques dans le cœur de projet et non comme un artifice cosmétique et électoraliste.
  • par son combat (et celui de tous les militants du FG) rendre possible une victoire de la gauche à ces élections.

Mais dans le même temps, cette reconnaissance constitue en même temps la limite de l’exercice:
Comme JL Mélenchon, je crois que la 5ème république et sa monarchie présidentielle sont révolues. Or, tout s’organise hélas autour de sa personne. C’est toute la limite de l’exercice (et le NPA version Besancenot est en train de s’en rendre compte d’une manière assez violente…).

C’est pourquoi, je ne partage pas la stratégie du Parti de Gauche, mais j’en partage le sens, l’orientation et les objectifs.

Je ne partage pas:

  • la démarche qui consiste à faire le boulot, puis prendre le risque de se faire tondre la laine sur le dos par quelques membres du PC qui ne sont pas tous sincères dans la démarche (chacun les siens, on me dira…)
  • la démarche qui a consisté trop souvent à se tromper d’adversaire (et singulièrement l’époque –  heureusement révolue, où l’essentiel du projet consistait au siphonnage des voix socialistes).
  • la démarche qui consiste, pour obtenir l’investiture aux présidentielles, à abandonner toutes les circonscriptions aux élus communistes. Véritable contradiction lorsqu’on promeut un régime parlementaire avec la 6ème République.

Mais c’est parce que nous partageons ces objectifs que nous devrons faire front commun.
C’est autour des valeurs que nous devons porter ensemble, que la gauche doit être recomposée. A gauche.

C’est pourquoi:

  • nous devons agir en interne pour que le PS respecte le FG (et réciproquement, ce qui a parfois été délicat…)
  • nous devons affirmer au sein du PS, qu’en aucun cas le PG ne doit être considéré comme un supplétif du PS. Le PG est notre âme damnée, celle qui doit nous rappeler l’endroit où nous sommes et l’époque à laquelle nous vivons, en nous obligeant à nous extirper du fameux socialisme municipal, pour assumer un socialisme de combat.
  • nous devons permettre au PG de se doter d’un véritable groupe parlementaire, qui n’aura de cesse de nous pourrir la vie (voilà bien une chose certaine), en assumant un renversement d’alliance. Il n’est pas envisageable – au-delà de la question du rapport de force entre les Verts et le FG –  que nous acceptions de libérer des circonscriptions pour des élus verts, voire des chevènementistes, et que rien ne se fasse en direction du Parti de Gauche. Il me semble à ce sujet que la dynamique historique et radicale des Verts a plus à voir avec le PG qu’avec la maelström d’EELV. De ce point de vue le parcours de Martine Billard, me semble exemplaire.

Pour mener à bien ce cheminement, les phases me semblent claires:

  • établir et maintenir le dialogue avec le PG et le FG, notamment en construisant une plateforme permanente de travail, respectueuse des positions de chacun, mais construisant le cheminement d’une recomposition à gauche.
  • éviter ainsi l’écueil allemand d’une sociale-démocratie qui préfère gouverner avec la droite qu’avec Die Linke.
  • permettre ainsi qu’une gauche française recomposée au pouvoir (claire sur ce qui la rassemble et ce qui la sépare, tout en l’assumant) trace une piste pour la gauche européenne renouvelée.

Mais avant tout cela, il faut que François Hollande soit au second tour.
Et dans un monde idéal, avec un FG à plus de 10 points !

 

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