Avant tout c’est une victoire du rassemblement de la gauche:
Cécile Saint-Marc, Arnaud Arfeuille et leurs remplaçants, Emilia Noah et Alessandro Di Somma, conservent à gauche le canton Mérignac 2, qui regroupe une partie de Mérignac, et les communes de Martignas et de Saint-Jean-d’Illac. À titre personnel, et avec une pensée pour tous les militant-e-s et sympathisant-e-s notamment illacais qui se sont impliqué-e-s dans cette campagne, j’en suis sincèrement ravi. D’autant que nous avons vu émerger de cette séquence deux conseiller-e-s départementaux, qui tout au long de cette campagne, on affirmé leurs convictions.
Cette victoire, c’est une victoire du rassemblement de la gauche. De tous les gauches. Et comme ils l’ont indiqué cela les engagent désormais.
Et pourtant cette victoire a un goût amer, notamment pour nous autres illacais-e-s.
Dans notre commune, c’est la droite illacaise qui est sortie en-tête de ces élections cantonales.
C’est le principe d’un scrutin. Il y a un gagnant et un ou des perdants. C’est la logique républicaine.
En bon républicain, féliciter la candidate illacaise, Denis Fumat, aurait du être pour moi une évidence.
C’est devenu une chose impossible.
Impossible, car c’est sur cette élection que pour la première fois, cette droite illacaise aura rompu avec sa tradition républicaine pour sombrer dans le nauséabond.
Explications…
La cour nauséabonde à l’électorat frontiste:
Que Hervé Seyve, Maire de la ville, s’engage dans un combat politique, c’est tout à fait légitime. Qu’il prenne parti pour l’une des membres de son équipe municipale l’est tout autant. On peut s’amuser même de sa « stratégie » consistant à placer des pions un peu partout: entre une élue municipale sur un ticket UMP / UDI (Denis Fumat), une autre sur un ticket Divers Droite (Sandrine Peny) et un adjoint aux finances, Fabrice Guillemet, un temps Modem, qui s’affiche en réunion publique pour soutenir le ticket Europe Ecologie Les Verts (à leur corps défendant), cela devient un peu compliqué de suivre la cohérence globale. Passons… Ils ont chacun le droit de faire leurs propres choix politiques et peut-être que tout cela échappe cruellement au bon vouloir d’Hervé Seyve.
Tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes, si, deux jours avant le deuxième tour de ce scrutin, les habitant-e-s de Saint-Jean-d’Illac n’avaient pas été les destinataires d’un tract de ce même Hervé Seyve. Un tract infamant et diffamant. On l’en savait capable. Mais ce dont on ne le savait pas capable, y compris la plupart des membres de sa propre équipe municipale, c’était sa capacité à aller draguer de la manière la plus nauséabonde les électeurs du Front National.
Que l’on se comprenne bien ! : je ne considère ni le vote, ni les électeurs du Front National comme nauséabonds:
- ce sont des citoyens comme les autres, qui en plus ont la caractéristique de pratiquer plutôt fortement leur devoir civique. On ne peut pas se plaindre de l’abstention et reprocher à des citoyens d’aller voter.
- je combats les idées portées par le FN. Mais c’est à nous d’aller les convaincre un par un de notre capacité collective à reconstruire un récit républicain, refabriquer notre désir collectif à faire « cité » ensemble.
- je combats le repli prôné par le FN. Mais c’est à nous de répondre à la colère qui s’empare d’un nombre toujours plus grand de nos concitoyens.
Ce que je considère comme parfaitement nauséabond, c’est de renoncer au travail de conviction sur la base de ses propositions, de ses idées, de ses valeurs et y préférer un discours stigmatisant qui vise à agiter les idées les plus réactionnaires et qui fracturent notre capacité et notre désir de vivre-ensemble:
« Parce que nous voulons des élus qui traitent les vrais problèmes dans le respect des lois et des coutumes de la France »
Voilà la phrase employé par Hervé Seyve…
Dans une République, dans une démocratie, respecter les lois, je sais et je comprends ce que cela veut dire. C’est même l’essence de la République.
En revanche considérer que certains élu-e-s seraient susceptibles de « traiter les vrais problèmes » en fonction des coutumes de la France, relève d’un discours que même les plus durs du Front National n’osent même pas porter dans un discours et encore moins un écrit public.
Celui qui se réclamait de l’esprit du 11 janvier:
C’est là une rupture complète avec l’esprit même du gaullisme social qui a longtemps prévalu dans la droite française. C’est là une approche grossière visant à « draguer » les électeurs du Front National sur une base parfaitement xénophobe, qui visent à attiser ce qui abime déjà assez notre pays. « Draguer » également au sens d’aller ramasser ce qui est au fond…
Mais où est donc passé cet esprit républicain du 11 janvier dont ce même Hervé Seyve se faisait le chantre il y a encore quelques semaines sur l’Esplanade Pierre Favre et même lors des derniers Conseils Municipaux ? Avant de rendre hommage à chacune des victimes, Hervé Seyve a-t-il pris soin de vérifier si chacune d’entre elle était en conformité avec « les coutumes de la France » ?
Même dans la Charte proposée par le FN pour gouverner les Conseils Départementaux, la question des « coutumes de la France » n’y figurent pas !
Une faute politique :
Dans la vie politique on fait toujours des choix.
Le terme laïcité aurait été républicain et rassembleur.
Hervé Seyve y a préféré le terme « les coutumes de la France »: il exacerbe les tensions de notre pays, en tentant d’attirer les gens à lui par le pire des discours.
C’est une double faute politique:
- en tant que Maire, au lieu de rassembler les citoyens de sa commune, au sens de ce qu’ils ont en commun, il « joue » sur ce qui les divise.
- en tant que politique, l’emploi d’une telle formule entache de manière indélébile sa propre pratique politique.
En parce que « qui ne dit mot consent », il serait de bon ton que celles et ceux qui désapprouvent l’emploi de ces mots, s’en démarquent explicitement. Sous peine de confusion des genres… qui entachera tout autant leur propre mandat politique.
Un vrai rubicon !
Une fois franchie, cette ligne rouge produit ses effets:
La gauche totalisait lors du premier tour 1005 voix, la droite 1061 voix. Le Front National progressait encore à 603 voix. 2803 votants pour 73 bulletins blancs ou nuls.
Lors du deuxième tour, la gauche totalisera 1000 voix, la droite 1473 voix, avec 223 votes blancs pour 2697 votants… 150 votes blancs supplémentaires. 603 voix FN – 150 bulletins blancs, soit 453… Et 473 voix de plus pour la droite entre le premier et le second tour.
Tous les scores du monde ne valent pas de telles compromissions !
Combattre les idées du FN, convaincre les électeurs du FN, sur la base de nos valeurs !
Voici ce qui devrait présider à tous les républicains illacais. Cela sera en tout cas notre ligne de conduite. Pour que chaque citoyen trouve sa place dans notre République. Une République qui pour nous s’appuie sur la possibilité pour chacun de grandir, s’émanciper. Une République qui accompagne, qui promeut. Une République qui fait en sorte que les gens soient jugés sur ce qu’ils font et non ce qu’ils sont.
