Hervé Seyve, annonçait fièrement, lors du dernier Conseil Municipal du 23 juin, qu’on allait voir ce qu’on allait voir, que sitôt arrivé, il lançait le « contournement de Saint-Jean-d’Illac » en réalisation le Barreau du Baron.
Pour autant que l’idée soit défendable, voire utile, nous étions quelques uns à attendre le tour de magie !
Lorsqu’on connait le coût de réalisation d’un tel équipement, les études préalables, et les exigences de sécurité que cela suppose, on se disait qu’on allait jeter un coup d’oeil tout de même au résultat.
Histoire d’anticiper, nous avons bien tenté, en tant que simple citoyen, de connaitre le contenu du marché de 600 000 euros (qui comprend plusieurs voiries), mais comme le recueil des actes administratifs n’est plus tenu à jour sur le site (bien qu’obligatoire)…
Bref les constats pratiques valant mieux que de longs discours:
Débutons par une devinette:
Deux images: l’une d’entre elle est une photo du « contournement de Saint-Jean-d’Illac », l’autre est une photo… de l’allée de mon garage…
Tic-tac… tic-tac…
Tadaaaaa:
Oups…
Toutes les routes mènent à l’enrobé… ou pas…
Hop, une petite visite sur le chantier, et discussion avec les ouvriers pour comprendre le travail mis en oeuvre:
« Non on ne fait pas d’enrobé, on va juste mettre du calcaire puis une couche de gravillon »…
Parfait.
Ni une, ni deux, pour éviter de dire des âneries, un peu de documentation sur ce qu’est le gravillon…: « Le revêtement en place, recouvert de gravillons, n’est pas conçu pour être normalement circulable, mais seulement ponctuellement emprunté dans le cadre d’interventions de maintenance.
Ouch… nous sommes bien loin d’un contournement « vital », véritable infrastructure routière…
Au moins on sera débarrassé des camions !
Aie… cela ne s’arrange décidément pas… la voie est interdite aux camions de 3,5t…. qui vont donc devoir passer en ville !
Étonnant pour un contournement.
Et quand on se croise, cela donne quoi ?
Bon, tant qu’il n’y a pas de vélo, et que les rétroviseurs sont rabattus…ça passe (les roues des deux véhicules sont un peu dans les talus, mais bon)… Voyons le bon coté des choses, c’est un coup à muscler nos fessiers !
Entrée / Sortie : ok… mais au milieu, danger !
Rappelons-le: le contournement est en général une voie plutôt directe qui – parce qu’elle permet de délester – suppose des voies plutôt directes, rapides, de gabarit correctement dimensionné, débouchant des équipements routiers d’interconnexion de qualité.
Résumons-nous: à l’entrée nous sommes sur le Giratoire du Baron d’un côté, puis le Giratoire des Cantines. C’est parfait. (et cela a été réalisé par l’équipe précédente).
Le vrai danger apparait à l’intersection du Chemin du Blayais et de ce « contournement » dit barreau du Baron: angle droit, aucune visibilité, et voitures qui arrivent dans les deux sens, sans aucun équipement de sécurité.
À nouveau, voyons le bon coté des choses: c’est décidément très bon pour nos fessiers !
Plus on se hâte, moins on avance !
Nous l’avons déjà évoqué sur le dossier de la municipalisation de la Crèche « Relais Bébé », mais il convient décidément de constater que la méthode de Hervé Seyve consiste manifestement à lancer les choses sans les avoir dimensionnées, organisées, préparées, accompagnées, voire co-financées. Mais j’y reviendrai.
Là aussi, il ne s’agit pas de savoir si on est pour ou contre ce contournement, mais plutôt de se dire que lorsqu’on fait un équipement de voirie que l’on veut structurant voire durable, il convient de faire sérieusement le travail… parce qu’on n’est pas en train de faire une allée de garage !
Mais où est l’étude de trafic ?
Que nous apprend la littérature sur les questions de voiries:
Les déplacements représentent une dimension de l’organisation sociale et du rapport entre l’homme et ses espaces de vie.
Il est donc nécessaire d’entreprendre une démarche systématique visant à la connaissance des trafics.Celle-ci commence par un recensement de l’état existant permettant :
- de hiérarchiser le réseau routier par rapport aux fonctions qu’il assure.
- de mettre en évidence les difficultés dans l’écoulement des flux (avec leurs conséquences sur les activités humaines).
L’évolution des activités est, elle-même génératrice de trafic. Sa prévision et l’analyse de ses impacts sur les déplacements deviendront des paramètres sur l’organisation de l’urbanisme (PLU et SCOT).
Dans cette logique, l’étude de trafic est une donnée nécessaire aux réflexions sur le développement des infrastructures de transport. Elle impactera directement les caractéristiques des voies à créer ainsi que les caractéristiques des chaussées.
Dans ce registre on peut citer des choix possibles :
- nécessité ou non d’une déviation d’agglomération ;
- choix du tracé par rapport aux zones bâties ;
- position des échangeurs ;
- géométrie des carrefours ;
- dimensionnement des chaussées en fonction des trafics poids lourds cumulés.
Il est donc nécessaire de quantifier ces déplacements existants et à venir. La première étape de ce type d’étude est le recensement de l’existant. Ce recensement permettra de hiérarchiser le réseau routier par rapport aux fonctions qu’il assure, et de mettre en évidence les difficultés dans l’écoulement du trafic et de ses conséquences sur l’activité humaine.
Dans le cas particulier de la route, l’étude de circulation s’appuiera essentiellement sur une étude de trafic. Cette étude permettra de définir le type d’aménagement à réaliser (nombre de voies, type d’échanges et aussi dimensionnement de la chaussée).
L’étude de trafic s’attachera à la connaissance des trafics :
- de transit, lorsqu’il s’agira d’apprécier l’opportunité d’une déviation d’agglomération ;
- la nature des flux, pour déterminer les points d’échange ;
- le niveau des trafics et leur évolution pour programmer dans le temps les investissements ;
- les mouvements directionnels permettent de définir les caractéristiques des échanges ;
- le niveau de trafic poids lourds déterminent directement le dimensionnement de la structure de chaussée.
Une étude de trafic se mène en général en cinq étapes :
- la définition du réseau ;
- l’analyse des trafics existants ;
- la détermination des conditions de circulation ;
- l’évaluation de l’évolution des trafics ;
- l’affectation des trafics.
Pour faire court: lorsqu’on fait un tel équipement, il est indispensable qu’il soit correctement dimensionné pour en déduire:
- son gabarit (et notamment sa largeur, les renforts au niveau des accotements, etc…)
- le type de revêtement à retenir
- le type d’équipement de sécurité à prévoir
La voirie : compétences de la Ville ou de la Communauté de Communes ?
Lors du dernier Conseil Municipal du 23 juin 2014, Fabrice Guillemet, adjoint délégué aux Finances, nous indiquait « La communauté de Communes a compétence en matière de voirie et de développement économique. Or la CDC à laquelle nous appartenons dépense en tout et pour tout 846 000 euros pour cela quand Saint-Jean-d’Illac dépense 5 millions d’euros par an ! »
Autrement dit, Fabrice Guillemet nous a d’abord expliqué que la Ville dépensait trop en matière de voirie, et que c’était à la Communauté de Communes de les payer. Puis, dans un même élan, nous a présenté dans le budget une dépense de 600 000 euros… pour de cette voirie ! Allez comprendre !!
Alors pour être parfaitement exact, la compétence de la Communauté de Communes est en réalité sur les voiries d’intérêt communautaire. Pour le coup, on peut facilement considérer que celle-ci pourrait entrer dans cette catégorie. Mais alors pourquoi donc demander aux illacais de financer cette voirie à eux seuls ? D’autant qu’aucune délibération autorisant Monsieur le Maire à solliciter une subvention n’est présentée. Aucun plan de financement n’est davantage présenté.
Si ce n’est nous dire que c’est au Conseil Général de la Gironde de payer !
J’en profite pour formuler deux remarques sur ce sujet:
- on atteint tout de même des sommets en matière de cynisme: ces élus passent leurs temps à dire que le Département ça ne sert à rien, sauf à dépenser de l’argent public, et dans le même temps ils passent leur temps à dire que ce même Conseil Général devrait prendre en charge leurs factures! Certainement une mauvaise habitude prise dans leur parti politique (…)
- si le Conseil Général de la Gironde ne veut pas aller sur un tel équipement, c’est que cette institution connait parfaitement les questions de voiries. Et les ingénieurs savent que ce n’est pas en mettant 5 centimètres de calcaire et du gravillon que l’on fait un contournement. Et que donc le coût réel serait d’un autre ordre. Dès lors, ils font une analyse exigeante en terme d’usage des deniers publics basée sur ce que cela coûte pour le service rendu. Et là forcément ça coince …
Néanmoins, dans un contexte qu’on ne maitrise pas trop, la Communauté de Communes a décidé d’intervenir à hauteur de 100 000€. Sauf que contrairement à la manière dont cela est formulé dans l’article de Sud-Ouest, le soutien financier de la CDC est dans le cadre de l’opération Terres de Jim d’une part, et, petit détail, il est rappelé … qu’une des conditions de ce financement était que… le Conseil Municipal de Saint-Jean-d’Illac aurait dû prendre une délibération à cet effet.
On rappelle de toutes les façons que, normalement, les subventions doivent être été demandées (voire notifiées avant l’engagement des travaux).
(source: Compte-rendu des délibérations de la CDC Jalles Eaux Bourdes)
Au final, cette voirie survivra-t-elle à la Manifestation « Terres de Jim » ?
On peut légitimement se poser la question lorsqu’on écoute Hervé Seyve, Maire de Saint-Jean-d’Illac:
« Quand on parle du championnat du monde, qu’on annonce un « G20 » à Saint Jean d’Illac, je dirais, au-delà de l’effet sémantique, il y a une réalité, c’est 300000 personnes pendant 4 jours avec de manière concrète des problèmes à régler. » Hervé Seyve – Conseil Municipal 28 avril 2014.
Comment une voie de gravillon, même présentée comme un contournement, peut-elle passer un G20 ?
La suite dans le prochain épisode… Peut-être devrons-nous encore ajouter 200 000 euros pour une voie de gravillons…
Pièces complémentaires:
CDC_CR_du_30.06.2014
Article Sud-Ouest (version photo)
